Contre la régression sécuritaire

Renouer avec la liberté, l’égalité, la justice 

"Le totalitarisme ne tend pas à soumettre les hommes à des règles despotiques, mais à un système dans lequel les hommes sont superflus." Hannah ArendtLes origines du totalitarisme

Organisations et citoyens d’horizons divers, nous sommes réunis pour tenter d’élaborer un discours et des actions alternatifs au modèle régressif sécuritaire aujourd’hui à l’oeuvre dans la plupart des démocraties occidentales. Nous avons l’ambition de porter une analyse globale sur l’évolution en cours.

Nous ne pouvons nous satisfaire d’une société qui, depuis plusieurs années, démantèle l’Etat social et renforce sans cesse l’Etat pénal ; une société dans laquelle le mode de régulation n’est plus social mais punitif et où l’outil pénal est utilisé au lieu et place de politiques sociales, sanitaires, éducatives. Nous refusons une société qui perçoit une partie de ses enfants comme une menace qu’il conviendrait de juguler par un recours accru à l’enfermement, en revenant un demi-siècle en arrière.

Nous nous revendiquons des droits de l’homme et du citoyen appliqués à tous, de la responsabilité citoyenne reconnue à tous, de la sécurité des personnes assurée par une action publique basée sur des dispositifs démocratiques développant droits et devoirs de chacun et de tous, des pratiques sociales axées sur la dignité des personnes. Un devoir collectif s’impose tous les jours davantage : s’opposer aux référentiels « scientifiques » d’appui aux politiques sécuritaires et néolibérales ainsi que l’instrumentalisation des dispositifs d’aide ; aider les travailleurs sociaux, les professionnels de santé, les enseignants, les personnels du monde judiciaire à s’en préserver et à maintenir une éthique et une politique de justice.

Nous saluons ici comme exemplaires des luttes récentes aussi diverses qu’essentielles : Pas de zéro de conduite, la mobilisation contre le fichage systématique de pans entiers de la population et notamment des enfants à travaers le fichier « base-élèves », le refus de la caporalisation des psychanalystes et psychothérapeutes, le collectif « anti-délation » contre la loi de prévention de la délinquance, la lutte du Réseau Education Sans Frontières, les grèves et luttes contre les remises en cause des droits sociaux et du droit du travail, la mobilisation contre les peines-planchers ou contre la loi « rétention de sûreté ».

Nous devons (re)faire un travail de délimitation et de différenciation des concepts et mots devenus passe-partout (liberté, justice, droit, sécurité, responsabilité, soin, …). Nous nous engageons à partager publiquement nos débats, nos élaborations, nos différences. Nous nous engageons à la mutualisation de nos moyens de recueil et de diffusion des informations, à la synergie de nos actions et prises de position, au soutien aux luttes, oppositions et résistances, à des démarches concertées auprès des pouvoirs publics, des élus, des media, à la mise en place et l’animation de débats, d’oeuvrer collectivement pour renouer avec la liberté, l’égalité et la justice.